Fuzzine. Néo psyché. The Tea Party. Titre « Cours après moi que je t'attrape ».
Ce matin, j'ai annoncé « groupe des années 90 » à la rédaction. Et des sourires ont fleuri dans le bureau. Noir Désir, Nirvana, Green Day ? Quelque chose de civilisé, de montrable, qu'on fasse enfin un peu de blé, merde. Naturellement quand la platine a craché The Tea Party, il a fallu déchanter. On était (youpi !!) reparti sur du pas-possible, de l'indéfendable-ailleurs-qu'ici. En vrai paladin, des têtes rouleraient, mais j'accomplirais ma mission. Par contre, en potassant mon sujet, avec le recul du temps, le cadeau fait par le hasard en 1993 (trop long à raconter, une vraie histoire de fous) se changeait, vite fait, en piège à ours.
Jugez, un trio canadien, mené par une certain Jeff Martin (nanti d'un melon pas possible) concoctant un bouillon de sorcières un tiers Doors, le reste pur essence Led Zep. Toujours susceptible d 'exploser à la gueule de ses géniteurs. Sur le paquet d'albums sortis, deux seulement sont bons (pardon TRES BONS) ce qui laisse zéro recul. Splendor Solis (1993) et Edges Of Twillight (1995) seront donc impitoyables. Pas pressés d'en finir, tirant dans la tête directement, pour économiser les bastos. Donc déjà tenter de démêler (un brin) le sac de nœuds gratiné qui s'annonce.
Sachant que le « Splendor Solis » est un traité d'alchimie allemand, de 1532. Avec des planches en couleur, s'il vous plait.
Superbe pochette, déjà. Deux oiseaux qui pirouettent devant le soleil, dans un esprit « prenons-nous-très-au-sérieux ». Premier morceau, The River. Qui claque tous les dogmes impériaux (et impérieux) de la sommité mal luné, ayant accaparé la parole. Un riff bizarre, le meilleur placement de batterie depuis que John Bonham a rangé sa caisse claire (pas donné à tout le monde) et une construction semblant trop hasardeuse pour l'être vraiment. Attendez, le Jeff Martin dont il est question plus haut n'a pas encore ouvert la bouche.
Quand son altesse consent à s'intéresser au micro, il le fait d'une voix surpuissante (Jimbo?) en récitant une saga prétentieuse. Ou il est question de naviguer sur le Styx (fleuve des enfers) qui devient rouge pour l'occasion. Ce qui est beaucoup moins impressionnant que sa performance de guitariste, soit dit en passant. Il a du en passer du temps à bosser son manuel du parfait petit Jimmy Page.
C'est bourré de machins bizarres, comme des hameçons sophistiqués, dégageant une odeur bizarre. Un peu comme si Aleister Crowley récitait une formule cabalistique, et disparaissait en ricanant. Vous (nous) laissant aux prises avec une créature à la Lovercraft. Une création dont la genèse dépasse l'entendement humain. Trop beau, trop grand. Avec des radiations sentant le népenthès, la datura et l'hellébore. Sans compter que la production (devinez qui?) est impeccable. Pas une lourdeur d'après digestion, pas une tache de gras sur la belle table.
Oh, c'est facile à écouter, du vrai petit lait.
Un peu trop léger pour être tout à fait honnête. Sinon, à quoi serviraient tous ces relents de musique arabe ou celtiques, ces gammes pas trouvés chez Gratteux Moyen, au déstockage des plans à trois sous. Et pas planqués derrière la saturation, écoutez moi tous ces passage en acoustique, léger comme la pluie sur la tombe de Bert Jansch (c'est pas drôle, je sais). Bon, pas non plus en tartiner deux heures, juste vous motiver à écouter. C'est sain, pas de problèmes.
Plus compliqué s'avère le cas Edges Of Twilight (1995). C'est qu'ils ont tellement peaufiné leur affaire, que du mercure serait sans doute plus facile à saisir à pleines mains. La où, auparavant on avait un seul climat, une seule humeur (de cochon) par morceau, ils ont découvert les joies de la boite à vitesses démultiplié. En même temps que le batteur était prié de donner dans l'inhumain. Le temps sans cesse décalé, découpé avec des doigts de fée, puis bastonné à mort, pour faire monter la sauce.
Je me garderais bien de dire que tout ce méli mélo d'idées, rappelle (comme en flashs rapides) les rares instants non foireux de Satanic Majesties Request. Pas envie de me retrouver le cul dans un tonneau de goudron, avec des plumes en prime. Bénéficier de l'accueil des Pieds Tendres, non merci. Trop dangereux de défendre un blues tendance Bo Diddley, transpercé par une guitare glaçante. Qui se met soudain à ressembler à la kermesse de Khe Sanh quand les viets se lâchent, et font pisser le napalm.
Pas plus qu'il ne sera question de chercher ce qui fait d'un tempo moyen comme Correspondences, un ruisseau dans lequel il il est loisible de boire une eau enfin pure. Aux étranges vertus curatives, cependant. Peut être à cause de la partie de basse bizarre, avant la sortie majestueuse, digne d'une altesse déchu. Et tout le reste, en sanscrit, en alphabet runique, inscrit de droite à gauche sur parchemin illisible
Bref, plus de vingt ans après, ces deux fichus disques continuent (nah !!!) à en faire uniquement à leur tête. Ont trouvé la solution pour qu'on leur fiche la paix, résonner en autistes surdoués. Communiquant sur une fréquence quasi impossible à capter correctement. Inutile de me demander la solution, si je l'avais je dormirais mieux.
https://www.youtube.com/watch?v=H3FvleUvpy8https://www.youtube.com/watch?v=4sVtsxG6kSE